
Andrew Harrison Member Name
Directeur du groupe Conception
La viabilité commerciale d’un projet d’extraction, comme une carrière, ne va pas nécessairement à l’encontre de la durabilité écologique. En fait, il peut être possible de maximiser les deux grâce à une conception intelligente et à la mise en œuvre de solutions durables.
Dans les villes en expansion rapide, la demande de matériaux de construction est déjà intense et ne fera qu’augmenter. Malgré le recyclage de matériaux dans certains grands projets de construction, on s’attend à ce que les besoins d’extraction grandissants épuisent les carrières existantes. De nombreuses nouvelles carrières seront nécessaires, idéalement le plus près possible de l’origine de la demande puisque le transport a une forte incidence sur le coût des matériaux et les émissions de gaz à effet de serre. La proximité est vitale pour maintenir les coûts de construction à un niveau raisonnable, ainsi que pour réduire les importantes émissions de carbone du roulage.
Cependant, les terrains vacants près des centres de population sont précieux et leur utilisation est largement contestée, ce qui rend difficile l’établissement de carrières à ces endroits. Les industries extractives dans de tels emplacements devront également naviguer des exigences de plus en plus strictes en matière de planification et d’attentes des collectivités, particulièrement au sujet du bruit, de la poussière, des impacts visuels et des conséquences environnementales sur la faune, la flore et l’eau.
Une excellente gestion des eaux tout au long de la vie de la carrière (et au-delà) est un pas dans la bonne direction vers une meilleure durabilité, la facilitation des approbations et une meilleure acceptation sociale – qui n’a pas nécessairement à coûter plus cher.
Il s’agit toutefois d’un défi complexe qui exige une expertise dans une vaste gamme de disciplines afin de mettre au point des solutions globales, coordonnées et durables. L’adoption d’une approche durable qui réduit au minimum les conséquences négatives et maximise les avantages nécessite de comprendre la gestion du volume et de la qualité de l’eau, la biodiversité, le soutien des écosystèmes et la commodité sociale ainsi que les moteurs commerciaux ou économiques, et d’intervenir de façon créative.
Lorsque ces considérations relatives à la gestion des eaux sont étudiées avec un éventail d’experts et d’intervenants, il est possible que les activités commerciales puissent se dérouler en toute sécurité dans un milieu fragile et donnent des résultats améliorant les conditions naturelles préexistantes.
Volume d’eau
Le volume d’eau soulève des problèmes majeurs pour les carrières, comme la gestion de grandes quantités de précipitations, d’eaux de ruissellement et d’eaux souterraines afin d’éviter une inondation de la fosse ou en aval ainsi que des conséquences défavorables sur les puits à proximité ou l’approvisionnement en eau adéquat pour l’utilisation sur le site ou le maintien du débit des eaux de surface en aval. Cela nécessite une compréhension approfondie des conditions hydrologiques du bassin versant et du site du projet, ainsi qu’une idée de la façon dont l’industrialisation et l’aménagement de ce bassin versant pourraient en modifier l’hydrologie. La conception doit aussi prévoir une certaine flexibilité pour gérer les variations des conditions hydrologiques apportées par le changement climatique.
La combinaison du changement climatique, de l’urbanisation croissante et de l’expansion du secteur industriel crée un paysage complexe pour la gestion des eaux. Les répercussions climatiques à l’échelle locale pourraient prendre la forme de conditions sèches attribuables à une réduction des précipitations ou, inversement, une augmentation de la fréquence et de l’intensité des averses – ou même une combinaison variable des deux.
Pour la gestion des eaux de surface, il est recommandé d’intégrer la résilience climatique à la solution en proposant une conception capable de contenir des débits de pointe supérieurs aux débits prévus en fonction des probabilités de dépassements annuels actuelles. Des principes de drainage durable, comme l’intégration d’éléments visant à ralentir et à réduire le ruissellement (p. ex. des baissières et des bassins secs), amélioreront grandement la gestion du volume d’eau.
Le bilan hydrique peut être modélisé afin d’évaluer toutes les sources d’eau qui entre dans la carrière et qui en sort. Cette modélisation devrait être réalisée pour avant et après l’aménagement du site. Si la modélisation après l’aménagement indique des pénuries d’eau, il faudrait envisager des options de récupération de l’eau et d’exploitation des nappes souterraines.
En plus de la modélisation, il est essentiel de surveiller continuellement le volume et la qualité de l’eau, autant en amont qu’en aval, et de mesurer la demande en eau de la carrière.
S’il est possible, un système en circuit fermé est idéal. Voilà où le drainage durable et la récupération de l’eau peuvent vraiment jouer un rôle, par exemple en récupérant l’eau qui ruisselle des aires de stockage et des zones couvertes dans un réservoir afin de la réutiliser sur le site.
Qualité de l’eau
Une préoccupation majeure concernant la gestion des eaux sur tout site industriel est la qualité de l’eau. Idéalement, l’eau qui quitte le site, ainsi que celle qui demeure sur place après la mise hors service, devrait respecter les exigences réglementaires appropriées et sa qualité devrait être égale ou supérieure à celle de l’eau présente avant l’aménagement du site. La filtration de la poussière et de la saleté qui se retrouvent inévitablement dans l’eau qui s’écoule du site représente un défi de l’exploitation d’une carrière.
Le ralentissement du ruissellement et une filtration naturelle aident à préserver ou à améliorer la qualité de l’eau. Le ralentissement du débit de l’eau qui traverse un site permet aux sédiments et aux polluants de se déposer avant que l’eau quitte le site pour rejoindre les cours d’eau naturels. Des bassins de retenue et de larges canaux peu profonds ralentiront le débit d’eau.
La végétation est un élément essentiel du processus de filtration, donc l’intégration de plantes indigènes dans un plan de gestion des eaux contribuera à l’amélioration de la qualité de l’eau en éliminant les contaminants.
Encore une fois, la surveillance sera essentielle pour assurer continuellement la qualité de l’eau. Il faudrait donc mettre en œuvre un suivi de la qualité de l’eau des cours d’eau en amont et en aval ainsi que des nappes souterraines aux alentours, en amont et en aval du site.
Biodiversité et soutien aux écosystèmes
L’approche de gestion des eaux sur le site et aux alentours de la carrière peut jouer un rôle important dans le soutien de la santé et de la diversité des écosystèmes locaux.
La première étape est de s’assurer que la localisation de la carrière évite, dans la mesure du possible, toute conséquence importante sur les cours d’eau ou la végétation indigène de valeur écologique élevée. S’il faut détourner un cours d’eau pour empêcher son entrée dans la zone d’exploitation active de la carrière, il est important de tenter de préserver les habitats existants et, au besoin, d’aménager de nouveaux habitats pour les poissons et le reste de la faune aquatique.
Au cours de la mise hors service progressive du site, l’intégration d’éléments hydriques et d’un aménagement paysager bien pensé comprenant de la végétation indigène peut soutenir les écosystèmes en améliorant l’habitant existant ou en offrant un nouvel habitant à la faune indigène (p. ex. oiseaux, insectes, grenouilles et poissons). La végétation indigène aidera les oiseaux et les insectes alors que les éléments hydriques peuvent offrir un habitat aux grenouilles et aux poissons. Il est possible d’aider encore davantage les grenouilles et les poissons au moyen d’éléments tels que des sections profondes et peu profondes, des rapides formés par des roches en cascade pour favoriser le mouvement en amont et en aval, et des zones à faible débit pour permettre aux poissons de se reposer. L’augmentation de la végétation riveraine et la gestion des mauvaises herbes le long des éléments hydriques et des cours d’eau amélioreront aussi fortement les résultats environnementaux globaux.
Commodité sociale
Les promoteurs de nouvelles carrières pourraient avoir de la difficulté à obtenir l’acceptation de la collectivité locale, mais l’acceptabilité sociale est essentielle à la réussite du projet. Faire preuve d’intendance écologique au moyen d’une gestion durable des ressources hydriques et des communautés riveraines ou aquatiques diversifiées sur le plan biologique favorisera l’acceptation sociale, tout comme l’ouverture et la transparence de la consultation des collectivités tout au long du cycle de vie du projet.
Idéalement, la collectivité devrait être invitée à participer à la planification de l’avenir du site au-delà de la vie commerciale active de la carrière. Il existe diverses façons créatives de réhabiliter les carrières hors service pour en faire de meilleures commodités sociales. Elles peuvent parfois devenir des espaces récréatifs publics bien aménagés qui comportent des plantes indigènes écologiquement vulnérables et des éléments hydriques tels que des étangs, des lacs et des ruisseaux. De telles approches seront bien reçues par les collectivités locales et sont également susceptibles d’augmenter la valeur commerciale du site.
Lorsque l’industrie extractive reconnaît l’importance de l’investissement dans l’excellence en matière de gestion des eaux tout au long du cycle de vie d’une carrière, autant l’industrie que l’environnement et les collectivités en profitent. Un projet de carrière qui réussit à concilier les objectifs commerciaux, environnementaux et sociaux peut laisser derrière de précieux matériaux abordables disponibles localement, ce qui permet d’éviter les émissions associées au transport. Un tel projet soutient également des espaces urbains durables, utilisables et résilients, qui sont accentués par des aires d’agrément sur le bord de rivières, pour le bien de la population et de la nature.