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La réglementation environnementale doit parvenir à un équilibre délicat entre, d’une part, une protection suffisante et, d’autre part, un fardeau qui ne soit pas trop lourd sur le plan de la conformité. Le travail de Golder sur les dangers que pose une catégorie de composés largement utilisés mais mal compris aide à protéger la santé humaine et l’environnement tout en permettant de gérer les coûts d’assainissement.
Depuis les années 1920, les alkanolamines (ou amines) sont utilisées pour traiter le gaz naturel considéré comme étant « acide » en raison de sa forte teneur en sulfure d’hydrogène (H2S). Introduites dans le gaz, les amines isolent le H2S, ce qui permet d’extraire le soufre, qui peut alors être vendu comme sous-produit. Les amines peuvent ensuite être recyclées et réutilisées. Il s’agit d’un processus bien établi : les amines sont utilisées dans environ 95 % des installations d’« adoucissement » de gaz aux États-Unis.
Ce système fonctionne bien, à condition que les amines soient confinées. Il arrive cependant qu’elles s’échappent, comme lorsqu’un pipeline se rompt catastrophiquement ou qu’un tuyau, une soudure, une vanne ou un autre élément du réseau fuit lentement. Une réglementation bien établie sur la protection des sols et des eaux souterraines s’applique en cas de déversement ou de fuite. Les mesures d’atténuation visant à assurer la conformité peuvent comprendre l’excavation et le traitement du sol, ainsi que le traitement des eaux de surface et souterraines qui peuvent avoir été en contact avec les amines fugitives.
La réglementation doit évoluer à mesure que nous acquérons des connaissances et de l’expérience à l’égard des solutions les plus efficaces et les plus pratiques. En travaillant de concert avec les organismes de réglementation et en proposant des solutions rigoureusement scientifiques, nous pouvons y voir plus clair et déterminer comment la conformité peut être simplifiée sans sacrifier les avantages attendus de la surveillance réglementaire.
Durant le processus d’élaboration, la réglementation axée sur le risque peut ne pas être tout à fait complète et ne pas tenir compte de tous les contaminants susceptibles de devenir préoccupants. À titre d’exemple, lorsque le type d’amine rejetée n’a pas déjà une valeur de toxicité, la tendance est de prévoir le pire, et par conséquent, d’appliquer la norme de diligence la plus élevée. Il peut s’agir d’une approche sensée quand les effets négatifs sont inconnus, mais une fois qu’ils sont compris, il faut établir des niveaux d’assainissement adéquats compte tenu du risque, afin de bien aborder le problème réel, plutôt que d’adopter par défaut l’hypothèse du niveau de toxicité le plus élevé. C’est ce qui se produit, par exemple, lorsqu’on applique à la méthyldiéthanolamine (MDEA), amine couramment utilisée dans les procédés d’adoucissement, la valeur de toxicité existante pour la diéthanolamine (DEA) afin d’établir le niveau d’assainissement nécessaire en fonction du risque. La toxicité de la MDEA est très différente de celle de la DEA, ce qui fait que l’application de la norme pour la DEA peut entraîner des travaux et des coûts considérables, sans pour autant régler efficacement le problème.
Les travaux peuvent consister à excaver et à traiter un plus gros volume de sol que nécessaire, ce qui peut être coûteux. En outre, ils causent une perturbation au sol, ainsi que des émissions de carbone associées au processus d’assainissement. Cela peut poser problème lorsqu’il faut assainir le sol jusqu’au niveau des eaux souterraines, surtout dans les régions arides de l’ouest des États-Unis, où la nappe phréatique peut être à 60 m (200 pieds) ou plus sous la surface.
L’analyse par lecture croisée pour combler les lacunes dans les données
Alors, comment peut-on arriver à définir des niveaux fondés sur le risque pour la gestion d’une substance dont les propriétés toxicologiques n’ont pas encore été établies? Cette question est importante pour la gestion non seulement des effets des amines, mais aussi d’une foule d’autres composés sans valeur de toxicité établie par un organisme de réglementation ni données adéquates sur la toxicité.
Dans ses travaux sur la MDEA et d’autres amines, Golder a appliqué la technique de la « lecture croisée », fondée sur l’idée que les produits chimiques qui ont des similitudes structurelles sont susceptibles d’avoir des propriétés physicochimiques et toxicologiques similaires, ainsi que des effets similaires sur l’environnement et la santé.
Par l’examen des données accessibles sur les propriétés physicochimiques ainsi que sur le mode d’action et la toxicité d’un composé bien connu, appelé « substitut », dont la similarité avec un composé qui n’est pas bien connu peut être démontrée, les techniques de lecture croisée aident à combler les lacunes dans les données sur les propriétés de ce dernier. Les données peuvent ensuite servir à établir, de façon transparente, les procédures réglementaires qui protégeront adéquatement la santé humaine et l’environnement, en évitant du travail et des coûts inutiles.
À l’heure actuelle, Golder utilise des techniques de lecture croisée pour recueillir des données sur la MDEA et sur une autre amine, appelée DIPA, afin de comprendre leur structure chimique, la façon dont se manifeste leur toxicité, ainsi que les cibles qu’elles affectent, par exemple le foie et le système nerveux central. L’équipe étudie également les propriétés physicochimiques de chaque composé, y compris sa mobilisation, sa solubilité et la façon dont il se déplace dans les eaux souterraines.
Application des connaissances acquises
Golder entreprend maintenant le processus de présentation de notre proposition et de négociation avec les organismes de réglementation sur l’établissement de valeurs de toxicité mises à jour pour la MDEA et la DIPA, calculées à l’aide des techniques de lecture croisée.
Pour aider le personnel de terrain des compagnies pétrolières et gazières, nous élaborons un guide pratique ou diagramme visant à orienter son travail. Celui-ci lui permettra de savoir exactement quoi faire s’il découvre une fuite d’un type particulier d’amine. Il contient notamment des instructions sur les mesures d’intervention en cas de déversement, les procédures de chaîne de possession appropriées et le type de laboratoire qui devrait analyser les échantillons.
Une meilleure compréhension de la façon dont les techniques de lecture croisée mises au point et utilisées depuis une dizaine d’années peuvent être appliquées de façon efficace et efficiente à d’autres composés continuera de profiter à l’industrie. Étant donné que de nouveaux composés sont créés constamment, il faut une approche transparente, fiable et systématique permettant d’obtenir de l’information sur la toxicité des composés pour lesquels cette information fait actuellement défaut.
Les constituants préoccupants pour les organismes de réglementation environnementale comme les alkyles perfluorés et polyfluorés, collectivement appelés PFAS, en sont un excellent exemple. Les techniques de lecture croisée peuvent aider à mieux comprendre ces composés, à obtenir rapidement de l’information sur la toxicité des PFAS pour lesquels on en a très peu et à établir des méthodes pour réglementer les démarches d’assainissement de façon efficace et efficiente.
Une meilleure compréhension des techniques de lecture croisée et leur acceptation plus large par les organismes de réglementation mettront à la disposition des spécialistes de l’environnement plus d’outils pour protéger l’environnement et les populations humaines, tout en permettant le progrès industriel.