
Garrett Hall Member Name
Associé principal et spécialiste en environnement

Paul Stewart Member Name
Associé principal et ingénieur en géotechnique
Partout dans le monde, la croissance de la population et l’urbanisation génèrent une énorme demande – sans cesse grandissante – en matériaux pour la construction résidentielle, urbaine, routière et d’infrastructures. Pour la plupart des gens, l’origine de ces matériaux est facilement oubliée, puisque les activités extractives dont nous dépendons sont souvent menées loin des regards. Mais il n’en sera pas toujours ainsi.
Bon nombre de nouvelles carrières ou d’agrandissements de carrières seront requis pour répondre aux besoins en sable, en pierre et en gravier des villes croissantes. Le coût élevé du transport des matériaux justifie le choix d’exploiter des carrières près des chantiers où les matériaux seront utilisés; autrement dit, près des centres de population.
Un exemple concret serait l’État de Victoria, en Australie, dont la capitale compte près de cinq millions d’habitants. Sa population croît actuellement d’environ 2,3 % par an et doublera d’ici 2050 selon les prévisions. Au cours de la même période, on prévoit que la demande en matériaux doublera, passant de 50 à 100 millions de tonnes par an. Les prévisions indiquent cependant que d’ici 2050, seulement 44 % des matériaux proviendront des 535 carrières existantes dans l’État de Victoria.
Voilà donc un défi à relever, non seulement à Victoria, mais aussi dans d’autres centres de population croissants. Plusieurs nouvelles carrières devront être ouvertes pour répondre à la demande en matériaux, mais où devra-t-on creuser? Idéalement, les carrières doivent être aussi rapprochées que possible de la zone à approvisionner. Le transport peut représenter jusqu’à 40 % des coûts des matériaux, donc la proximité est vitale pour maintenir les coûts de construction à un niveau raisonnable, ainsi que pour réduire les émissions de carbone! Par contre, les terrains vacants situés près des agglomérations ont une valeur élevée. Leur utilisation est très contestée, et les préoccupations des communautés rendent l’acceptation sociale difficile à obtenir.
Pour assurer leur réussite, les promoteurs de nouvelles carrières devront trouver un site optimal, gagner la confiance et l’acceptation de la communauté locale, mener des négociations fructueuses avec les organismes de réglementation et planifier la revalorisation du site à la fin de sa vie utile.
Repérer un site optimal
Trouver le meilleur emplacement pour une nouvelle carrière n’est pas une tâche facile. Le premier critère est d’ordre géologique : le volume doit être suffisant pour permettre l’extraction des matériaux désirés. Divers autres facteurs doivent également être examinés, notamment l’emplacement des carrières existantes et les volumes de ressources, les zones d’extension urbaine prévues, la distance entre la carrière et les milieux récepteurs potentiellement sensibles, les contraintes législatives liées à la planification, les réseaux routiers locaux, artères et chemins de fer existants, et l’emplacement des sites qui auront besoin des ressources, y compris les infrastructures exigeantes en ressources comme les futurs réseaux ferroviaires et routes.
Compte tenu de la multiplicité des facteurs, il serait avantageux de mettre à profit des outils numériques d’ingénierie, tels que des systèmes d’information géographique (SIG), pour examiner simultanément l’ensemble des considérations, définir les ressources à privilégier et les zones d’approvisionnement pour répondre à la demande projetée, puis localiser les chantiers potentiels en fonction de divers critères de sélection d’un site.
Mener des négociations fructueuses avec les organismes de réglementation
Une fois le site potentiel déterminé, il est temps d’entamer les négociations (ou d’obtenir le meilleur soutien à la négociation) quant aux procédures statutaires requises pour mettre la carrière en exploitation dans un environnement complexe. Cette étape comprend généralement plusieurs processus d’approbation, dont l’obtention de permis de construire auprès de conseils municipaux et l’obtention de permis d’extraction auprès d’organismes de réglementation gouvernementaux en vertu des lois applicables sur l’extraction de minerai.
Lors de ces processus, des conditions permanentes pourraient être imposées au détenteur du permis, comme des exigences de surveillance de la qualité de l’air et des eaux rejetées. Dans certaines circonstances, le site du chantier pourrait abriter des espèces rares ou menacées, et le promoteur devra se reporter à la loi sur la biodiversité appropriée. Une approbation pourrait aussi être exigée pour l’extraction d’eau souterraine. Les terrains vierges fragiles sur le plan environnemental devront faire l’objet d’une étude d’impact complète.
Il est crucial de mobiliser proactivement les décideurs, les organismes de réglementation et les divers organismes de renvoi dès le début du projet afin de cerner, puis d’évaluer et de gérer les risques potentiels, lesquels pourraient retarder considérablement les processus d’approbation. Une présentation claire des renseignements attendus par ces intervenants dès le départ accélérera nettement le processus d’approbation et réduira le risque de refus.
Même si le processus d’évaluation et d’approbation du projet est aussi rigoureux et approprié que possible, certains pourraient encore s’opposer au projet, ce qui compliquera la planification et l’obtention d’autorisations légales. Dans de telles circonstances, les promoteurs de la carrière auront possiblement à défendre leurs intérêts en justice. Il est donc essentiel de gagner la confiance et l’acceptation des intervenants dans la communauté locale. La plupart du temps, les promoteurs peuvent se prémunir contre les oppositions et les appels en mobilisant de façon proactive les intervenants des communautés au début du projet afin de mieux comprendre leurs préoccupations, puis d’y répondre.
Renforcer la confiance et l’acceptation des communautés
Les membres des communautés veulent bénéficier de routes en bon état, d’infrastructures robustes et de biens à prix avantageux, tels qu’un îlot de cuisine en pierre ou un plancher en béton poli. Par contre, sont-ils prêts à vivre ou à travailler près d’une carrière? La confiance et l’acceptation de la communauté sont décisives pour la réussite d’un projet et essentielles pour protéger la réputation du promoteur et lui ouvrir la voie à d’autres projets couronnés de succès.
Les membres de la communauté pourraient être préoccupés par la forte circulation de véhicules ou de camions roulant à haute vitesse, les bruits et la vibration causés par le dynamitage et l’extraction, la poussière, la perte de l’attrait visuel global de la région et les conséquences environnementales pour la faune, la flore et l’eau.
Les promoteurs auraient intérêt à engager les intervenants de la communauté touchée aussi tôt que possible. Il est vital de cerner leurs préoccupations et de leur expliquer comment celles-ci seront réglées dès l’étape de planification. Diverses méthodes s’offrent aux promoteurs pour collaborer avec les communautés, et leur choix dépendra de nombreux facteurs. En définitive, la meilleure stratégie pour bâtir une relation de confiance repose sur l’honnêteté, la transparence, la proactivité, l’écoute active des préoccupations et la formulation de réponses promptes et respectueuses aux craintes et objections.
Concevoir la carrière avec la sécurité et l’efficacité en tête
Les plans de carrière limités à un tracé en deux dimensions sur une carte sont chose du passé. Les organismes de réglementation de l’industrie extractive et du secteur minier exigent désormais que ces plans comprennent une évaluation et un plan de gestion détaillés des risques géotechniques. De plus, ces documents doivent être mis en application et enrichis tout au long du cycle de vie de la carrière.
Les organismes de réglementation insistent sur la sécurité des travailleurs sur le site et des communautés avoisinantes, avec raison, et l’importance d’évaluer et de gérer les risques géotechniques est basée sur des faits. D’un autre point de vue, l’évaluation géotechnique peut aussi favoriser l’efficacité de l’exploitation du site. Elle aide à éclairer la conception de la carrière et du plan d’extraction des ressources ainsi qu’à réduire les risques pour la sécurité, en plus de favoriser l’efficacité grâce à des plans détaillés de progression par étapes, à l’élimination de tâches de manutention en double et à des possibilités de réhabilitation graduelle durant l’exploitation.
Il est vital que les exploitants de carrière évaluent de manière holistique les risques géotechniques en tenant compte non seulement de l’exploitation et de la sécurité dans l’immédiat, mais aussi de la vie du site après l’extraction. Durant l’évaluation et la planification de la carrière, nous recommandons de concevoir la forme du terrain de sorte à favoriser une réhabilitation accélérée du site et une valeur ajoutée pour de futures utilisations.
Planifier les utilisations de la carrière après la fermeture
Revenons maintenant à l’exemple sur Victoria : selon les prévisions, environ 300 carrières dans cet État devront fermer au cours des 30 prochaines années. Tous ces sites devront être réhabilités ou convertis afin d’être utilisés autrement. Si la carrière est conçue sur un terrain vierge, il faudra réfléchir aux scénarios à long terme et discuter des plans de réhabilitation post-fermeture du site avec divers intervenants dès le début du projet, même si plusieurs décennies s’écouleront avant que des interventions ne soient requises.
Par le passé, les anciennes carrières étaient principalement réaffectées en sites d’enfouissement ou simplement rendues sûres, puis abandonnées. La différence est qu’à l’heure actuelle, on voit émerger de nombreuses solutions plus attrayantes et novatrices à potentielle valeur ajoutée pour intégrer des carrières abandonnées au paysage urbain. Grâce à des techniques astucieuses de conception et d’aménagement paysager, ces sites pourront être transformés en propriétés résidentielles, commerciales ou récréatives attrayantes à valeur élevée dans un contexte d’étalement urbain.
L’intégration de plans créatifs pour améliorer les espaces communautaires et l’environnement favoriserait l’acceptabilité sociale d’un projet de carrière, tout en contribuant à la réussite de la planification et à la proposition de valeur en général.