
Lorsqu’on pense à l’archéologie et à la gestion des ressources historiques, l’image qui peut venir à l’esprit est celle d’un site d’excavation poussiéreux où des archéologues tamisent de pleines brouettes de terre à la recherche d’artéfacts. Mais en réalité, ils utilisent de plus en plus la technologie moderne pour approfondir notre compréhension du passé : logiciels d’amélioration de l’image, numérisation sur le terrain, modélisation prédictive, LIDAR et photogrammétrie, entre autres. Ces nouvelles technologies nous aident aussi à présenter nos conclusions à nos clients et à nos partenaires autochtones.
Les chercheurs en art rupestre ont à leur disposition un logiciel d’amélioration de l’image appelé DStretch pour faciliter l’analyse et l’identification des œuvres qu’ils étudient. Ce logiciel permet de rendre visibles, aux fins de recherche et de conservation, des images (appelées pictogrammes) qui seraient autrement presque invisibles à l’œil nu. Il s’agit d’une application logicielle de rehaussement des couleurs spécialement mise au point pour la détection de l’art rupestre par Jon Harman (Harman 2015). Son utilisation a mené à de nombreuses découvertes et révisions de notre interprétation de sites connus. Un exemple d’œuvre d’art rupestre nouvellement identifiée se trouve dans le parc provincial Writing-on-Stone/Asinapi, site du patrimoine mondial de l’UNESCO. Les programmes de détection qui y sont menés ont été un élément important de la candidature du parc à la désignation de site du patrimoine mondial de l’UNESCO. L’œuvre en question a été identifiée dans le cadre d’un programme de détection faisant appel à des bénévoles auquel des employés de Golder ont participé en 2016 (Turney et coll. 2021).
Golder prend part aux programmes de détection de l’art rupestre au parc provincial Writing-on-Stone depuis plusieurs années. La Confédération des Pieds Noirs (Siksikáíítsitapi) considère ce lieu comme étant sacré, et sa valeur universelle exceptionnelle a été reconnue en 2019 lorsque l’UNESCO en a fait un site du patrimoine mondial. Writing-on-Stone est l’un des endroits où l’on trouve la plus forte concentration d’art rupestre dans l’ouest de l’Amérique du Nord. La plupart des œuvres qui y sont visibles remontent à la fin de la période antérieure à l’arrivée des Européens et au début de la période postérieure à celle-ci, c’est-à-dire de 1 000 ans avant le présent jusqu’au milieu du vingtième siècle. Les œuvres les plus anciennes pourraient remonter à 3 000 ans avant aujourd’hui.
Grâce au logiciel DStretch, les chercheurs peuvent voir clairement de nouveaux styles d’art rupestre qui n’avaient pas encore été identifiés dans la région du parc Writing-on-Stone. L’image ci-dessous (figures 1 et 2) est un « avant-après » qui montre de la peinture ocre grandement décolorée, mais rehaussée grâce au logiciel. Le style d’art rupestre illustré aux figures 1 et 2 est appelé « série verticale ». Selon des chercheurs en art rupestre des Grandes Plaines, c’est ce qui se rapprocherait le plus d’une langue écrite dans le contexte de l’Amérique du Nord autochtone. Keyser et Klassen (2001 : 294) soulignent que des données probantes appuient clairement l’interprétation selon laquelle l’art rupestre est un système d’écriture idéographique rudimentaire, ce qui est un accomplissement sans précédent dans l’art rupestre des plaines du nord-ouest américain. Il y a actuellement 17 sites où des séries verticales ont été identifiées avec certitude dans les plaines du Nord-ouest, dont le site où la photo ci-dessous a été prise, qui présente les caractéristiques distinctives de cette tradition picturale (Kaiser et Keyser 2019).

Figure 2 (après) : photographie du panneau 21, face B, DgOv-2, améliorée à l’aide du logiciel DStretch et mettant en évidence une série verticale.
L’utilisation des nouvelles technologies nous a permis de mieux comprendre cet important site d’art rupestre. Writing-on-Stone est un site bien documenté, ayant déjà été visité par de nombreux chercheurs dans le passé, mais ce n’est que récemment que nous avons pu en refaire l’analyse et identifier les nouveaux éléments des panneaux d’art rupestre déjà répertoriés. La plupart des gens auraient de la difficulté à voir de la peinture ocre à la figure 1 sans amélioration de l’image par le logiciel DStretch. L’image est transformée par le rehaussement (figure 2). Les logiciels d’amélioration de l’image aident les chercheurs à mieux répertorier et préserver des œuvres d’art rupestre très décolorées pour les générations futures. Le logiciel DStretch est actuellement accessible sous forme d’application iPhone et Android, et il y a aussi une version pour ordinateur de bureau, à l’adresse suivante : www.dstretch.com (en anglais seulement). Bien que les applications pour téléphone puissent être un outil de détection utile, il est recommandé d’utiliser une caméra SLR de grande qualité pour obtenir les meilleurs résultats possibles.
Références
- Harman, J. (2015) Using DStretch for Rock Art Recording. INORA (Lettre internationale d’informations sur l’art rupestre. 72 : 24 à 30.)
- Kaiser, David A. et James D. Keyser (2019) Looking North: The Origin of the VS. American Indian Rock Art. 45 :1 à 19.
- Keyser, James D. et Michael A. Klassen (2001) Plains Indian Rock Art. University of British Columbia Press, Vancouver.
- Michael Turney, Landon Bendiak et Jack W. Brink (2021) - New discoveries of Vertical Series and Foothills Abstract rock art at Writing-on-Stone, DgOv-2, sud de l’Alberta, Plains Anthropologist.